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La pratique des souhaits

Photo du rédacteur: philippe fabriphilippe fabri

Dernière mise à jour : 17 nov. 2022


Mes chers amis,


Pour ceux qui souhaitent approfondir les enseignements bouddhistes, je vous livre la retranscription d'un enseignement bouddhiste sur les souhaits par lama Jampa Thayé.

Dans la religion chrétienne cela s'appelle des intentions.

Je pense que la profonde compréhension de l'esprit dans lequel les souhaits sont posés est très importante.

La première compréhension est de réaliser que la souffrance est le résultat d'une action non-vertueuse et le bonheur est le résultat d'une action vertueuse, pas dans le sens d'une punition ou d'une récompense face au bien ou au mal, mais que c'est juste comme cela que la vie fonctionne. Nos actes ont des conséquences dont nous sommes bien ignorants. Cette ignorance est la racine de notre souffrance.

Mais il y a une compréhension plus profonde que je vous laisse découvrir dans le texte ci-dessous.

Pour ceux qui ne connaissent les prières de souhaits, je vous donne l'exemple de la Prière d’aspiration pour la réalisation du Grand-Sceau du Mahamoudra.



Je vous souhaite à tous une très belle journée.


Philippe


LES SOUHAITS : MISE EN APPLICATION ET FORCE


Enseignement donné par LAMA JAMPA THAYÉ


(Paris/09.22)






Tout d’abord, je voudrais exprimer à quel point je suis heureux d’être ici, à Dhagpo Paris, après les événements de ces 2 dernières années et plus encore, de voir ce nouveau centre qui existe évidemment grâce à la bénédiction de Sa Sainteté et de Rinpoché, mais aussi grâce à vos propres efforts. C’est un très bel espace et je suis heureux que ce soit un centre du Dharma.


Je vais vous parler de l’importance des souhaits dans la tradition bouddhique. Il n’y a pas de textes particuliers qui enseignent au sujet des souhaits. Ce thème n’est pas évoqué dans les textes, mais je vais expliquer ce qu’ils sont, pourquoi ils fonctionnent et pourquoi ils constituent une partie importante de notre pratique.

En effet, on pourrait penser que les souhaits sont inutiles, que cela relève du conte de fée de croire qu’ils ont du pouvoir. On pourrait trouver étrange qu’il y ait cette pratique de souhaits dans le bouddhisme, c’est pourquoi je vais en parler.


Je vais commencer par définir plus précisément ce que nous entendons par ‘souhaits’.

Dans la tradition bouddhique, il y a beaucoup de prière.

- Il y a tout d’abord le désir de s’en remettre aux trois joyaux : ce sont les souhaits du refuge.

- Il y a l’engagement d’atteindre la bouddhéité pour le bienfait de tous les êtres : ce sont les vœux de bodhichitta ;

- Il y a la requête que l’on formule envers les lamas, envers la lignée de lamas : c’est une requête de bénédiction.

- Il y a la requête que les choses se passent de façon auspicieuse.

- Enfin, il y a les prières formulées dans le vajrayana sur une déité particulière.


Ainsi, il y a un vaste éventail de prières qui sont désignées en tibétain par le terme mönlam, pranidhana en sanskrit. Littéralement, mönlam signifie le chemin des souhaits.

Les prières de souhaits peuvent être exprimées ainsi :

Puissent tous les êtres et moi-même atteindre la bouddhéité tous ensemble.

Annoncer les choses ainsi est source d’inspiration pour nous.


Dans le mahayana, beaucoup de prières sont formelles comme La reine des prières d’aspiration de Samantabhadra ou La prière d’aspiration du bodhisattva Maitreya. Ce sont des mönlams qui ont été pratiqués par ces bodhisattvas ainsi que par les disciples du Bouddha. Quand nous pratiquons ces prières d’aspiration, nous nous mettons d’une certaine façon dans les pas de ces bodhisattvas, nous imitons leurs actions et nous relions notre pratique à leur pratique.


Comment ces souhaits fonctionnent-ils véritablement ? Comment ont-ils de la force, de la puissance ? La réponse vient du Bouddha lui-même : tout repose sur l’intention. Avoir une intention puissante dans l’esprit produit un résultat et plus l’intention et forte, plus le résultat sera là.

Pourquoi ce dont on a l’intention se produit-il ? Pour comprendre cela, il faut comprendre le fonctionnement de la nature de l’esprit lui-même, sinon, nous n’aurons pas confiance dans le fait que l’intention ait cette force. Il est enseigné dans les soutras du mahayana et dans les tantras que l’esprit est la base de tout. L’esprit est à la fois le fondement du samsara, c’est-à-dire le cycle de la souffrance, de l’emprisonnement dans la naissance et la mort, et le fondement de la libération, encore appelé nirvana. L’esprit est le créateur de ces deux aspects.


La nature de l’esprit n’a jamais été impure, entachée par les apparences, par les émotions perturbatrices, par le karma, par le samsara. La nature de l’esprit a toujours été complètement pure depuis des temps sans commencement. Bien qu’il y ait des apparences impures dans l’esprit, sa nature n’a jamais été altérée ; la nature de l’esprit a toujours été l’union de la vacuité et de la clarté, autrement dit de l’union de la vacuité et de la luminosité.

Mais, du fait de l’ignorance habituelle, nous ne reconnaissons pas la nature de l’esprit. Ainsi le sujet, l’objet, les émotions perturbatrices ne sont rien d’autre que l’esprit lui-même, ils sont la manifestation de sa clarté. Cependant, dans le même temps, la clarté de l’esprit n’a pas de caractéristiques, n’a pas de nature intrinsèque : elle est vide par nature et n’a jamais été entachée par les manifestations samsariques. C’est parce que la nature de leur esprit est pure que tous les êtres sensibles ont la capacité d’atteindre la bouddhéité bien qu’ils soient incapables de la reconnaître. Nous avons tous en nous cette capacité de sagesse et de compassion. Ainsi, l’esprit a la capacité de produire le samsara ou celle d’entrer en nirvana. Quand l’esprit ne reconnaît pas sa propre nature, le samsara apparaît, quand il la reconnaît, le samsara cesse et c’est le nirvana. C’est ainsi que l’esprit est la base de tout : rien d’extérieur ne produit le samsara et le nirvana, tout repose sur l’esprit lui-même. C’est le 1er point qui permet d’expliquer pourquoi la pratique des souhaits fonctionne.


Pour aller plus loin, nous pouvons observer comment l’esprit crée le samsara. En fait, c’est à travers les actes, ce qu’on appelle le karma, que nous expérimentons une souffrance ou un bonheur temporaire au quotidien. Ces actions n’ont un résultat que parce qu’elles apparaissent à partir d’une intention. Le karma, c’est à la fois l’intention et ce qu’il en résulte dans la parole et le corps. L’intention est ce qui produit toutes les expériences, c’est la racine de toutes les expériences samsariques et, en ce sens, le karma est l’expression d’une intention. Ce n’est pas le diable ou une force extérieure qui a produit ce que nous vivons, c’est l’exercice d’une intention. De jour en jour, de vie en vie, nous faisons des choix et c’est notre intention qui ne cesse de produire le samsara. Cela signifie que nous pouvons changer notre intention, celle qui est fondée sur le désir, sur la haine, sur l’ignorance, c’est-à-dire sur la saisie d’un ego, pour pouvoir la transformer en une intention basée sur l’amour, la compassion, la sagesse. C’est pourquoi le mahayana insiste sur les mönlams, c’est-à-dire sur une pratique des souhaits visant à changer notre intention. Au lieu de produire davantage de souffrance, nous façonnons le chemin du Dharma et c’est ainsi qu’encore une fois, tout repose sur notre intention : la souffrance est le résultat d’une intention non vertueuse et le bonheur est le résultat d’une intention vertueuse. C’est pour cette raison que, quand nous nous embarquons sur le chemin du mahayana, la pratique des souhaits vertueux est mise en avant. C’est une forme d’entraînement de l’esprit. On pourrait dire que ce que nous souhaitons est ce que nous deviendrons.


Dans les Sept points de l’entraînement de l’esprit, le 4ème point qui concerne les 5 forces – la confession, etc – il y a la pratique des mönlams ou du chemin des souhaits. Pour nous aider à comprendre la voie du chemin des souhaits, il y a 3 niveaux, 3 sphères distinctes, que je vais expliquer.

En fait, pour nous, êtres ordinaires qui sommes des débutants sur le chemin, quel est le bienfait des souhaits, qu’il s’agisse des souhaits informels que nous formulons nous-mêmes ou bien des souhaits formels que nous pouvons trouver dans La reine des prières d’aspiration ?

Dès que nous formulons des souhaits, tout commence à changer immédiatement dans notre attitude, dans la façon dont nous regardons les êtres, dont nous considérons le monde. En effet, quand nous prenons les vœux de bodhisattva, que nous générons la bodhichitta, il y a à la fois l’aspiration de mener tous les êtres à la bouddhéité et l’application qui consiste à s’engager sur le chemin. Mais, quand nous l’avons fait une fois, ensuite, il faut maintenir ces vœux vivants. Pour cela,, il faut pratiquer les souhaits parce que nous sommes constamment pris dans le flot de nos mauvaises habitudes. Prendre le vœu de bodhisattva une fois, c’est en quelque sorte un éclair de lumière dans l’obscurité. La bodhichitta peut être perdue car la saisie de l’ego est très puissante et pour entretenir cette petite flamme de la bodhichitta, il faut pratiquer les mönlams. Nous pourrons ainsi maintenir cette flamme vivante et l’amplifier. Nous commençons donc par formuler cette aspiration de la bodhichitta et, en récitant les prières de souhaits des mönlams, nous allons être inspirés par les accomplissements des grands bodhisattvas qui ont été jusqu’au bout du chemin. C’est pourquoi, pour les débutants, les souhaits sont transformateurs. Ils permettent d’accumuler du mérite. En fait, l’accumulation de mérite consiste à ce qu’accomplir des souhaits, des actions vertueuses devienne une habitude. C’est ainsi que la bodhichitta sera renforcée.

Ainsi, nous essayons délibérément d’imiter les actes de Samantabhadra quand nous récitons La Reine des Prières de Souhaits. En fait, nous sommes comme des bébés bodhisattvas et, en nous reliant aux vastes actions de Samantabhadra, en quelque sorte nous grandissons. Nous sommes dans une forme d’émulation avec Samantabhadra et Manjushri et ainsi nous relions notre activité à la leur ainsi qu’à celle des bodhisattvas du présent, comme par exemple Sa Sainteté Karmapa que nous considérons comme un bouddha. Nous nous joignons à ses prières, à ses souhaits et, de cette façon, cela rend nos souhaits beaucoup plus forts. Nous imitons Sa Sainteté, nous nous relions aux prières des grands maîtres et nous pouvons dire d’ailleurs qu’en exprimant ces souhaits, ces prières, Sa Sainteté nous donne l’opportunité d’étendre notre propre esprit et d’aller de l’avant sur le chemin du bodhisattva.


Nous pourrions dire : « Moi, je ne suis qu’un être misérable avec ma saisie de l’ego. Je n’ai pas cette grande intention qu’avait Samantabhadra ou qu’à le Karmapa. C’est un peu artificiel, un peu faux de faire ce souhait d’éteindre toute la souffrance du samsara ». C’est vrai, d’une certaine manière, mais vous savez bien qu’il est dit qu’il faut faire semblant jusqu’à ce que nous y arrivions. Là, vous voyez que j’ai passé trop de temps aux Etats-Unis ; l’Amérique, c’est le pays du fake ! En réalité, il est vrai, d’une certaine manière, que c’est faux, artificiel. Mais en même temps, c’est un profond enseignement du Dharma parce qu’en imitant les meilleurs, que ce soit Samantabhadra, Karmapa, etc., nous découvrons notre propre capacité pour la compassion et la sagesse extraordinaires. Ainsi cette fausseté, cet artifice est en soi un profond enseignement du Dharma.

Mon maître Karma Trinley Rinpoché – je précise qu’il a aujourd’hui 91 ans et qu’il vient de Namtchen au Tibet car beaucoup d’autres maîtres portent ce nom aujourd’hui – donc, mon lama m’a dit un jour : « Si tu as mal à la tête, prends La Reine des Prières d’Aspiration, ouvre au hasard n’importe quelle page et récite n’importe lequel des vers, des souhaits, et cela soignera ton mal de tête ; cela élargira ton esprit. En fait, quand nous sommes malades, nous avons tendance à éprouver une sorte de pitié pour nous-mêmes, nous nous sentons petits, et la puissance d’un souhait, quel qu’il soit, va faire exploser ta douleur ». C’est dans ce sens que c’est un enseignement très profond.


Pour nous, êtres ordinaires qui débutons sur la voie du mahayana, nous venons de voir le bienfait de réciter des souhaits. Pour les bodhisattvas très avancés, la pratique du souhait ou mönlam, est beaucoup plus puissante. À chaque terre des bodhisattvas, nous réalisons l’une des 10 perfections. Il est dit qu’au 8ème niveau du bodhisattva, appelé le bhumi immuable, les bodhisattvas atteignent la perfection du chemin du souhait, que celui-ci est accompli. Ils ont parfait le pouvoir des mönlams, du chemin des souhaits, et ils sont capables de purifier tous les champs des bouddhas. Ainsi, ils ont la force, la puissance de pouvoir tout transformer, de tout purifier à travers la pureté de leurs intentions.

La pratique des souhaits peut être accomplie par les êtres ordinaires, par les êtres nobles ainsi que dans l’activité compassionnée des bouddhas. Celle-ci est accomplie sans concept, jusqu’à ce que le samsara soit vidé de tous les êtres sensibles et elle est le résultat des mönlams. Comme l’explique Shantideva dans le Bodhicharyavatara : Sans concept les bouddhas agissent pour le bienfait de tous les êtres et c’est le résultat de leurs mönlams antérieurs.


Nous pouvons nous demander si tous les souhaits qui sont exprimés dans les prières de souhaits, sont réalisables, s’ils peuvent être exaucés. Il faut faire une distinction entre les souhaits réalisables et les souhaits irréalisables :

– Les souhaits réalisables sont ceux qui peuvent être exaucés au sein d’une échelle de temps particulière. Par exemple, si je souhaite : « Dans toutes mes vies, puissé-je ne jamais oublier le Dharma, puissé-je renaître entouré d’amis spirituels », c’est un souhait réalisable parce qu’en générant cette intention, nous l’ancrons dans le courant de notre esprit, et dans la prochaine vie, cela aura pour effet de nous permettre de nous souvenir du dharma, de nous rapprocher d’amis du Dharma. C’est en cela que c’est un souhait réalisable.

– D'autres souhaits ne sont pas réalisables sur le moment. Si nous faisons le souhait que tous les êtres soient immédiatement libérés de la souffrance, ce n’est pas réalisable parce que le fait d’être libéré de la souffrance dépend du fait de se tourner vers le Dharma. Or, comme les êtres ont accumulé du karma, ce n’est pas possible. Pour que ce soit réalisable, il faudrait que les causes de souffrance soient supprimées et ce n’est pas ce qui se passe ; il faudrait que tout le monde se libère immédiatement en se tournant vers les enseignements du Bouddha, or ce n’est pas réalisable sur le moment.

Alors, nous pourrions nous dire qu’exprimer de tels souhaits est futile, que c’est une perte de temps. Ce n’est pas vrai parce qu’en formulant des souhaits irréalisables, nous renforçons notre bodhichitta, nous avançons sur le chemin, nous développons la capacité d’aider les êtres et ainsi nous pouvons œuvrer à aider les êtres. C’est pourquoi cette pratique des souhaits, même s'ils sont irréalisables, est très puissante. Ainsi, nous devrions pratiquer à la fois les souhaits réalisables et les souhaits non réalisables.


Une 2ème pourrait apparaître est : ai-je la capacité d’aider les êtres avec mes souhaits ?

Une réponse réaliste à cette question, c’est que nous, petits débutants bodhisattvas, nous n’avons pas une grande capacité, nous ne disposons pas de grands moyens pour aider les êtres à travers nos souhaits. Néanmoins, en reliant nos propres souhaits aux souhaits des grands bodhisattvas, ils peuvent atteindre de grands effets. Ce n’est pas notre propre force, notre propre puissance qui va jouer, mais, du fait que nous allons prier les bouddhas, les bodhisattvas de bénir les êtres, en ce sens, nous allons accomplir des actions vertueuses, nous allons aider les êtres. C’est pourquoi il faut toujours relier nos propres souhaits à ceux des grands êtres réalisés.


J’ai déjà fait référence à plusieurs des grands mönlams, grands au sens de célèbres et bénéfiques. Il y a d’abord La reine des Prières de souhaits de Samantabhadra ainsi que les souhaits de Maitreya qui sont tous 2 des soutras du mahayana : pour Samantabhadra, l’Avantamsikasutra, et pour Maitreya, le Ratnakutasutra. Il y a aussi le chapitre 10 du Bodhicharyavatara de Shantideva qui est un chapitre de dédicaces, mais qui est, en réalité, une série de versets exprimant de nobles souhaits.

Je pense que la plupart d’entre vous a reçu des enseignements de Sa Sainteté Karmapa sur ces prières de souhaits, à Dhagpo. Concernant La reine des Prières de Souhaits, il y a de nombreux commentaires sur la manière dont nous devons réciter ces souhaits et sur leur signification. Donc, si vous le souhaitez, vous pouvez recevoir des enseignements sur ces commentaires pour pouvoir pratiquer cette prière de souhaits de façon efficace.

En plus, de ces 3 textes que je viens d’évoquer, nous pouvons citer aussi plusieurs textes concernant les souhaits pour renaître en Sukhavati ou Dewachen. Il y a également les mönlams du mahamudra, la prière de souhaits du mahamudra qu’a enseignée notamment Shamar Rinpoché à Dhagpo Kagyü Ling. Nous pouvons citer aussi les mönlams de la base du chemin et du fruit du dzokchen qui sont des textes du maître nyingmapa Jigmé Nyingpa. Il y a donc de nombreux mönlams dans le mahayana et le vajrayana.

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